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vague

"Vague" de John Ashbery

Traduit par Marc Chénetier
aux éditions Joca Seria

(note de lecture)

"La plupart des hommes ont de la poésie une idée si vague que ce vague même de leur idée est pour eux la poésie" écrivait Valéry dans Tel Quel. Soyons clair, il n'est rien de vague dans la poésie, sinon ce à quoi elle se mesure. Sa tâche est de poursuivre afin de l'établir cette vague même qui donne son titre (A wave) au livre de John Ashbery: la vague infiniment mobile de l'instable et du trompeur... Comme l'écrit Marc Chénetier dans sa postface "l'imprécision, l'indécision, l'incertitude sont centrales dans cette oeuvre".

L'écriture prête ainsi des formes (et celle que mobilise ce livre sont très diverses) à ce qui n'est d'abord que de l'informe et du furtif, voire du grossier, du frivole, du décoratif, du routinier, de l'illusoire, du ruineux, du saugrenu, du périlleux, etc..., bref appelons cela tout simplement "matière humaine"... Et c'est en y mettant les formes que le poète dessine une trajectoire verbale parmi turbulences et indécisions.

Sous la plume et le clavier de John Ashbery, l'écriture poétique est dotée de capacités focales très singulières: elle fixe la mouche sur le mur et risque un court-circuit qui rapproche soudain le passant d'un grain de sable sur la pierre ou d'un "lambeau de ciel desséché". Elle met à l'étude nos distances et nos proximités. Elle prend en note nos  égarements. Elle "aperçoit son oeil dans le miroir". Elle trébuche avec nous. Elle parle à haute voix de ce qui reste tu, tout en semblant ne guère y prêter attention. Le poète américain excelle à marier le coq avec l'âne, comme à nouer l'idée à l'incident et la sonnerie du téléphone au bruit du vent. Il sait introduire ce qu'il faut de prose négligente dans les vers, déranger "les structures familières" et faire semblant de causer à l'oreille du lecteur quand mine de rien il lui fait les poches.

Jean-Michel Maulpoix