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Une version plus approfondie et détaillée de ce texte est proposée dans Adieux au poème de Jean-Michel Maulpoix, publié aux éditions José Corti en 2005. Prix Louis Barthou.


Autres essais:


Victor Hugo


« La poésie est suspendue ; mise en question, aujourd’hui par elle-même au centre d’elle-même. »

Michel Deguy


Charles Baudelaire


Parler est facile, et tracer des mots sur la page,

en règle générale, est risquer peu de chose 

Philippe Jaccottet


Du Lyrisme, essai de Jean-Michel Maulpoix, paru aux éditions José Corti


Anna Akhmatova


"Les poètes, étant donné qu’eux aussi veulent alléger la vie à l’homme, détournent leur regard du présent pénible ou aident le présent à prendre, par une lueur qu’ils font briller du passé, des couleurs nouvelles."

Nietzsche


Paul Valéry


Octavio Paz



Sa faculté majeure est de discerner, dans les choses, des rapports justes mais non évidents qui, dans un rapprochement violent, seront susceptibles de produire, par un accord imprévu, une émotion que le spectacle des choses elles-mêmes serait incapable de nous donner.

Pierre Reverdy


Henri Michaux


Ovide


"La vérité de parole, je l'ai dite sans hésiter la guerre contre l'image -le monde-image-, pour la présence."

Yves Bonnefoy

 


R.M.Rilke


Michel Deguy



Hölderlin


Emily Dickinson


Aimé Césaire


Stéphane Mallarmé


Henri Michaux


Victor Segalen


Lorca


Senghor


Lamartine


Pierre Reverdy


Louis Aragon


Antonin Artaud


Basho


S. Beckett


SJ Perse


C. Esteban


Ronsard


W.B.Yeats


Supervielle


Whitman


Tzara


Verlaine et Rimbaud


E. Jabès


Jacques Dupin


Pablo Neruda


Juan Jamon Jimenez


M. Darwich


Boris Pasternak


 

 


E.A.Poe


Dante


Ungaretti


G.Apollinaire


J.Brault


Paul Claudel


Max Jacob


C.Reznikoff


A.Salmon


Jean Grosjean


A. de Vigny


R. Frost


Le poète perplexe, essai de JM.Maulpoix aux éditions José Corti






Qu'est-ce que la poésie ?

ou que dire de la poésie ?

par Jean-Michel Maulpoix

 

"Les prétendues définitions de la poésie ne sont, et ne peuvent être, que des documents sur la manière de voir et de s'exprimer de leurs auteurs" (Paul Valéry)

La poésie est mal aimée de la critique. Elle constitue un objet d’étude difficile à cerner, en constante mutation à travers l’histoire, et sur lequel la théorie a peu de prise. Bien qu’elle donne lieu à ces nettes découpes de langue qu’on appelle poèmes, si solidement établis dans leur forme propre qu’on n’y pourrait changer un seul mot, il semble qu’elle refuse toujours de s’enclore. De sorte que parler de la poésie conduit la plupart du temps à tenir un discours mal approprié : trop technique ou trop subjectif. Le théoricien désireux de construire un système rigoureux doit se résigner à une navrante déperdition d’efficacité critique.

Comment, pour la décrire, pourrait-on se satisfaire des formules qui fleurissent dans les manuels, telles que « chant de la nature », « célébration des dieux », « expression des sentiments personnels » ou « dérèglement du langage » ? Ce sont là autant de stéréotypes qui étouffent les enjeux véritables de l’écriture. Sans être tout à fait dépourvus de sens, ils négligent les singularités. L’indéfini y trouve refuge. Par les discours qu’on tient sur elle,  la poésie se voit dissoute dans les généralités, plutôt que placée au centre d’une réflexion cruciale sur le langage.

Les « Dictionnaires de poétique » n’offrent guère pour leur part que des outils qui facilitent l’observation des formes, sans ouvrir de véritable accès à la question du sens… À maints égards, la poésie reste l’orpheline de la critique. C’est plutôt dans l’œuvre même des poètes, sur les marges ou au cœur de leurs poèmes, que des clefs nous sont proposées : les préfaces de Victor Hugo, les lettres de Rimbaud, les Divagations de Mallarmé, les Cahiers de Valéry, la Correspondance ou les Elégies de Rilke, etc…

Il n’existe pas, à ma connaissance, de sérieuse étude des discours critiques sur la poésie. Nulle histoire, à proprement parler, n’en a été écrite. Celle-ci pourtant réserverait d’étranges surprises. On y vérifierait combien les commentaires oscillent entre subjectivisme, mysticisme, spontanéisme et formalisme ; mais on y découvrirait également que la poésie suscite autant de vagues discours que de partis pris tranchants. Tout au long de l’époque moderne, il semble que le fossé n’ait cessé de se creuser entre la rigueur des analyses conduites par les poètes eux-mêmes et le caractère approximatif des propos tenus par la tradition universitaire ou par les critiques de profession. Vague au dehors, dur au dedans, est-il un art qui ait vu autant que celui-là son histoire jalonnée de querelles, de ruptures et de manifestes, ni qui se soit autant retourné contre lui-même ? En procès intense avec elle-même, la poésie doit sans cesse rendre des comptes, s’auto justifier et répondre à la question de son pourquoi.

Les fulminations de Charles Baudelaire ou d’Arthur Rimbaud contre Alfred de Musset, les propos rageurs de René Char contre les « paresseux », la vindicte de Francis Ponge contre le lyrisme élégiaque, le soupçon d’Yves Bonnefoy contre l’image, la radicale mise en cause par Philippe Jaccottet des leurres du poétique, autant d’exemples qui vérifient que la poésie est un terrain d’affrontements, voire un champ de bataille à propos du langage et de ses enjeux…

Cette intransigeance intellectuelle est le fait de poètes devant à tout moment réaffirmer bien plus que leur conception de l’art qu’ils pratiquent ou leurs partis pris esthétiques : c’est leur raison d’être même qui est en cause. Parce qu’ils touchent à la langue. Parce qu’ils y nouent le subjectif et l’objectif. Parce qu’ils prennent le risque du mensonge et de l’illusion. Parce qu’ils font souvent parler les choses inanimées et les morts. Parce qu’ils se tournent vers autre chose, sur quoi la raison n’a pas prise.  Parce qu’ils se laissent conduire par la chair et écrivent sans autre contrôle que celui de leur propre vigilance…

Une fois reconnus ces enjeux que l’époque moderne a mis en pleine lumière, il n’est pas étonnant que la poésie se dérobe à toute définition… Son objet n’existe que dans le travail même qu’elle accomplit, tel une cible mouvante que chaque poème localise à sa façon sans l’atteindre jamais. Nul ne peut prétendre définir la poésie, si au sens strict cela consiste à en dégager l’essence, et donc à dire ce qu’elle ne peut pas ne pas être. L’écriture poétique a pour principe de toujours passer outre : il s’agit de « brûler l’enclos », affirmait René Char.

Pourtant, il est aussi dans la vocation de la poésie de travailler sans cesse à se définir, se redéfinir. Ainsi que l’écrit Michel Deguy : « l’inquiétude de la poésie sur son essence habite la poésie dès son commencement grec. » Elle est étrangement ce travail à la fois aveugle et inquiet du langage qui ne peut que chercher toujours à en savoir plus sur ce qu’il fait et sur ce qui se joue en lui. À travers les propositions formelles du poème, elle remet à la fois la langue en jeu et sa propre existence en question.

 

C’est à coup sûr l’un des traits particuliers de la modernité que d’avoir dégagé la poésie de motivations extérieures, telles que « la morale » et « l’enseignement », pour la conduire à se pencher de plus en plus sur elle-même : s’observer, se scruter, se décrire… Égarant ses anciens repères, ils l’ont mise hors d’elle-même, hors du vers par exemple, voire hors du poème. Sortie du bien et du beau, ils l’ont retournée contre le « poétisme ». Ils lui ont fait jeter ses richesses aux orties. Ils l’ont dénudée, simplifiée, aplatie à l’extrême.

Désireuse d’isoler ce qui lui est spécifique, pour savoir davantage ce qu’elle peut et ce qu’elle est, la poésie moderne a exaspéré sa propre dimension critique. Plus « problématique » que jamais, elle a engagé elle-même le procès de ses excès, jusqu’à remettre durement en cause certains de ses plus anciens attributs : l’image, le sentiment, l’espérance, la célébration… Chez quelques-uns de nos contemporains les plus lucides, elle s’est voulue possible autrement : en prenant à rebours les excès et les chimères dont elle avait depuis longtemps fait son ordinaire, sans rien sacrifier cependant de ce rapport singulier à l’inexprimable qu’elle autorise, voire en le renforçant par un implacable travail de mise à nu de la parole.

On pourrait aussi bien dire que le poète moderne ne cesse d’en finir, ou qu’il continue en s’efforçant d’en finir : en retournant la poésie contre elle-même, il en éprouve la résistance.

Comme l’écrit encore Michel Deguy : « La poésie est suspendue ; mise en question, aujourd’hui par elle-même au centre d’elle-même. » Il semble que l’on puisse ainsi observer, au long de la modernité, une pression croissante du questionnement philosophique dans la poésie : la question de son sens et de sa raison d’être se voit posée par le poète dans le poème même qui en vient parfois à ne plus exister qu’à travers ces questions. Voici, à titre d’exemple, un extrait d’À la lumière d’hiver de Philippe Jaccottet :

 

Parler est facile, et tracer des mots sur la page,

en règle générale, est risquer peu de chose :

un ouvrage de dentellière, calfeutré,

paisible (on a pu même demander

à la bougie une clarté plus douce, plus trompeuse),

tous les mots sont écrits de la même encre,

« fleur » et « peur » par exemple sont presque pareils,

et j’aurai beau répéter « sang » du haut en bas

de la page, elle n’en sera pas tachée,

ni moi blessé.

 

Que la poésie moderne réfléchisse ainsi à haute voix ne signifie pas qu’elle soit devenue spéculative (elle l’a été largement aux temps classiques et romantiques), mais qu’elle est plutôt de plus en plus spéculaire : toute attachée à la mise en œuvre de la réflexivité interne au langage. Procéder au « nettoyage de la situation verbale » : la célèbre formule de Paul Valéry résume assez bien cette exigence.  Où la philosophie définit des concepts, la poésie découpe des objets de langue où se renouvelle notre entente du réel, du sujet et du langage.

Je ne peux trouver à la poésie de raison d’être plus évidente que le simple fait que nous soyons des créatures qui parlent. Par cette parole humaine qui nous constitue, nous nous tenons au bord du monde, d’une tout autre manière que les animaux, liés et séparés, à la fois immergés en lui et y faisant face, aussi curieux de ce qui existe que tracassés par ce qui n’existe pas. Puisque nous sommes des créatures parlantes, taraudées par le désir et le souci, une place s’est faite en nous pour ces espèces de notions étranges que sont l’idéal, l’absolu, l’impossible ou l’éternité… La poésie existe parce que le langage articulé inscrit en vérité en nous beaucoup plus que ce que nous pouvons dire, ou parce que les mots ne sont pas une simple monnaie d’échange, mais nous portent au-delà de ce que nous pouvons penser ou saisir. Elle est par excellence le lieu où s’articule notre insatisfaction, notre contradiction. Elle trace, de poème en poème, nos lignes de fuite et donne à entendre notre marche boiteuse et contrariée. Réel et idéal, coupure et liaison, avancée et retournement, chercherie et trouvaille, voilà autant de couples de notions opposées que le travail poétique ne cesse de confronter, tirant de leur contradiction sa force. Le poème est la scène sur laquelle vient se jouer le drame de l’expression propre à la créature parlante. On y voit la langue se débattre. On y entend l’effort de la créature pour s’orienter dans son propre inconnu. Souvenez-vous, par exemple, de l’étrange ouverture de La Jeune Parque de Paul Valéry :

Qui pleure là, sinon le vent simple, à cette heure

Seule, avec diamants extrêmes ?… Mais qui pleure,

Si proche de moi-même au moment de pleurer ?

Loin donc de m’attacher ici à quelque improbable définition de la poésie, j’ai choisi de la décrire aux prises avec les forces contraires qu’elle met en jeu. Décrire ce que je pourrais appeler ses faits et gestes, en observant quelques-uns de ces couples de notions qui reviennent avec insistance sous la plume des poètes. Telle sera ma façon, nécessairement limitée, de répondre à l'inépuisable question Qu'est-ce que la poésie ?


1. Avancer / se retourner

Quiconque ouvre une anthologie de poésie ne peut qu’être frappé par l’insistance de deux motifs apparemment antagonistes :  l’en-avant et le retournement. D’un côté une célébration de l’éveil, du départ et de l’en allée, orientée vers le futur. De l’autre, une mélancolie crépusculaire, tournée vers la remémoration du passé. Parfois étroitement conjugués l’un à l’autre (comme dans le célèbre poème de Victor Hugo « Demain dès l’aube »), ces deux motifs ont une valeur structurelle forte : ils nous renseignent sur les enjeux de l’expérience lyrique.

Ces deux motifs sont présents dès le mythe d’Orphée que la poésie occidentale n’a cessé de reprendre et de styliser, reconnaissant de longue date en lui quelque chose comme la fable de ses origines.

On se souvient qu’après avoir perdu Eurydice, morte de la morsure d’un serpent, Orphée descendit avec courage aux Enfers dans l’espoir de la ramener. Il y charma de ses chants le passeur, adoucit les trois Juges des Morts, suspendit les supplices des damnés, et finit par obtenir du cruel Hadès la permission de ramener son épouse parmi les vivants. À cela, Hadès mit une condition : qu’Orphée ne se retourne pas jusqu’à ce qu’Eurydice soit revenue sous la lumière du soleil. Or, par coupable impatience, Orphée ne tint pas sa promesse : entrevoyant la lumière du jour, il se retourna pour s’assurer que sa compagne le suivait et il la perdit pour toujours. C’est alors que commença la douloureuse errance qui fit de lui ce chanteur éploré capable d’entraîner à sa suite ces vies muettes que sont les arbres et les animaux sauvages…

Tel que ce mythe le laisse entendre, le chant d’amour naît de la perte : pour ramener à la lumière l’Objet perdu, la poésie va parmi les ombres et traite avec elles. Il peut arriver qu’elle les charme et soit tout près de les vaincre ou de les convaincre… Elle ne descend pas aux Enfers par esprit de conquête, mais par amour, pour tenter de sauver l’amour…

Son en-avant perpétuel a pour origine un regard tourné vers la mort. La « voix errante » d’Orphée prend appui sur le vide. Elle est celle du premier grand « échec », tel qu’il fonde la lyrique. Tordu comme un thyrse, Orphée est à la fois mémoire et prophétie : il invente à partir d’une perte. Le veuf inconsolable est aussi un civilisateur : on l’a dit législateur, philosophe, inventeur à la fois de l’alphabet, de la musique et de la poésie. Première figure de la réflexivité élégiaque, il transforme sa solitude fatale et désespérée en dons pour la communauté des hommes. Il est donc celui qui retourne la perte en don. Aux Enfers déjà, sa douleur et son chant avaient eu la capacité d’émouvoir les ombres sans consistance : une communauté fugace avait pu se créer autour de sa douleur. À partir d’une séparation, il suscite du rapprochement.. Il remembre ce qui s’est disjoint. Il rappelle ce qui s’est perdu. Sa légende raconte une histoire de mots et de créatures qui affluent autour d’un chant. Son père naturel Oeagre était un dieu-fleuve.

À l’instar d’Orphée, le poète apparaît d’abord comme un homme qui se retourne : Orphée vers Eurydice, Villon vers les « neiges d’antan », Du Bellay vers son Petit Liré, Lamartine vers la voix d’Elvire, Baudelaire vers le « vert paradis des amours enfantines « , Rimbaud cherchant « la petite morte derrière les rosiers », Apollinaire au fil du Rhin, voyant se défleurir les cerisiers de  « Mai »  qui  « se figeaient en arrière », ou encore s’exclamant « Je me retournerai souvent »… Telle est la déclinaison assidue d’un ubi sunt qui alimente la dimension élégiaque de l’écriture : « Où sont nos amoureuses ? », « Que sont nos amis devenus ? »… La poésie dit aussi bien “ je me souviens ” que « Nevermore »…

Que voit, que montre le poète en se retournant ? Ce qui naguère fut réuni : une conjonction, une conjoncture. C’est vers des liens qu’il se retourne, aussi bien que vers des lieux ou vers un temps. Le retournement sollicite conjointement l’espace et le temps. Il est un travail de mémoire. Ainsi le poète s’avère-t-il, selon la formule de Mallarmé, « le Montreur des choses passées », celui qui donne à voir le temps, un professeur de finitude. Son regard se porte sur ce qui n’est plus, aussi bien que sur ce qui est destiné à s’éteindre.

Pour Nietzsche pourtant, ce retournement est aussi une façon d’alléger la vie :

« Les poètes, étant donné qu’eux aussi veulent alléger la vie à l’homme, détournent leur regard du présent pénible ou aident le présent à prendre, par une lueur qu’ils font briller du passé, des couleurs nouvelles. Pour y réussir, il leur faut être eux-mêmes à beaucoup d’égards des êtres tournés en arrière : en sorte qu’ils peuvent servir de pont, pour mener à des époques et à des idées très lointaines, à des religions et à des civilisations mourantes ou mortes. » [1]

Ces époques, ces « idées très lointaines » dont parle Nietzsche, c’est ce que Pascal Quignard appelle le jadis[2]. Il observe que les plus anciennes figurations humaines sont des rétrospections.[3]  « Un présent intense est du jadis vivant » écrit-il.

Sans doute la poésie a-t-elle pour fond la nostalgie. Nostalgie du jadis et du naguère, nostalgie du perdu, de l’origine, de l’impossible.  « Nostalgie » provient d’un mot grec, nostos, qui signifie « retour ». Comme l’écrit encore Quignard « le nostos est le fond de l’âme. La maladie du retour impossible du perdu – la nostalgia – est le premier vice de la pensée, à côté de l’appétence au langage. »[4] Ce sont de très vieux liens qui dans la poésie ne cessent de se dénouer et de se renouer : chant d’amour de la mère, berceuse par quoi les mots se voudraient de souffle et de chair, chaleur du discours et lyrisme donc… Il appartient au poème, par sa musique comme par ses images, de nous lier encore à ce qui a disparu.

Le poète ne se contente pas d’évoquer, de veiller ou de commémorer avec nostalgie le jadis, il le travaille comme une substance vivante , un matériau précieux, mental et verbal : il en réveille l’éclat perdu, il en dessine la scène, il le ramène vers le présent, jusqu’à la présence.

Ce jadis, c’est l’originaire, le fondateur, c’est-à-dire l’assise obscure de l’existence du sujet, aussi bien que la mémoire enfouie de la culture. A la façon du baiser du Prince, l’écriture réveille une mémoire heureuse, aussi bien qu’un jadis endormi dans la langue, dissimulé par exemple dans l’étymologie des mots, la règle syntyaxique, ou dans les mythes et les symboles auxquels s’accordent les images…

Mais si le jadis est de l’originaire, se retourner, c’est aussi bien recommencer. Répéter la façon dont le chaos fut ajointé en monde. C’est reproduire la genèse de la personne et de son désir, aussi bien que celle, toujours imaginaire, de la terre même où nous vivons. Et c’est encore regarder vers le pourquoi du poème. En poursuivre l’indéfinie chercherie.

« Chercher » sera donc mon deuxième motif…


2. Chercher / trouver

 

Nous nous souvenons qu’au Moyen-âge, le poète était dit troubadour ou trouvère, c’est-à-dire trouveur. Les romantiques faisaient encore de lui un élu, un inspiré recevant de la nature et de la rêverie cette espèce de parole heureusement « trouvée » que naguère lui dispensaient les muses. Déconcerter par la surprise comme le souhaitait Baudelaire, être un inventeur d’inconnu comme le voulait Rimbaud « laisser la place à la trouvaille » comme le réclamait Apollinaire, ce sont là quelques-uns des motifs qui placent la poésie au plus près du don gratuit, telle un phénomène d’entente et de réception singulier, dépourvu de cause précise. Cette grâce de la trouvaille, appliquée cette fois au monde extérieur, constitue d’ailleurs un des sujets préférés de l’écriture poétique : qu’il s’agisse de l’éveil de la nature, de l’apparition soudaine d’une figure aimée ou de « l’objet trouvé » cher aux surréalistes, elle privilégie les imprévisibles points de rencontre, les instants où la trajectoire ordinaire de la vie se voit tout à coup traversée par quelque émerveillement.

Mais si le poète est trouveur, il est aussi chercheur. Curieusement, l’une des étymologies parfois proposées du mot « rime » le rapproche non de rythme mais du verbe latin « rimare » qui signifie « rechercher, examiner avec soin ».

 « Il va, il court, il cherche. Que cherche-t-il ? » écrivait Baudelaire à propos du « peintre de la vie moderne » Que cherche donc la poésie, sinon, comme Henri Michaux, à « approcher le problème d’être » ? En posant des questions qui portent moins sur l’être que sur la circonstance : « Où sommes-nous ? » « Quand sommes-nous ? » Ainsi de Rilke demandant dans sa cinquième Élégie : « Où donc, où est le lieu ? » , ou Verlaine faisant dialoguer l’âme et le cœur dans la septième « Ariette oubliée » des Romances sans paroles :

Mon âme dit à mon cœur : Sais-je

Moi-même que nous veut ce piège

 

D’être présents bien qu’exilés,

Encore que loin en allés ?

­

Moins chantante qu’interrogative, moins inspirée que questionneuse, la poésie moderne est un tissage de mots dans la perplexité. Par la précision de ses tours, elle entrouvre un peu la langue sur notre ignorance. Peut être dit poète, celui qui nous rappelle, dans le vif du langage, que ce monde n’est pas maîtrisé. Celui qui nous rouvre (en sa profondeur) cet espace que nous croyions fermé. Celui qui nous invite à nous remettre en chemin. Celui qui nous enjoint d’exister, tout simplement. « Que reste-t-il ? Sinon cette façon de poser la question qui se nomme la poésie » écrit Philippe Jaccottet dans Éléments d’un songe. Il illustre à nouveau ce motif dans un texte d’A la lumière d’hiver intitulé « Autres chants » dont voici un extrait :

Cherchons plutôt hors de portée, ou par je ne sais quel geste,

quel bond ou quel oubli qui ne s’appelle plus

ni « chercher », ni « trouver »

C’est ainsi à une espèce de retournement radical que la modernité nous donne à assister : l’inspiré naguère protégé des dieux est devenu l’être perplexe qui protège la question.

Dans un de ses essais, Heidegger affirme « Etre poète, c’est mesurer »[5]. La poésie, en effet, est un langage métré, qui arpente le site de « l’habiter » humain, dans « l’entre-deux du ciel et de la terre ». La  créature y prend la mesure de ce qui lui appartient et s’y mesure à ce qui la dépasse. Elle tourne son regard vers les êtres et vers les objets du monde proche, aussi bien que vers d’invisibles lointains ou vers les hauteurs de l’azur. Mesurer l’entre-deux, tel serait le travail du poète dont le parcours est familier autant que périlleux puisqu’il lui faut dire les choses ordinaires de la vie aussi bien que s’acheminer vers des régions extrêmes où s’égare le sens.

Le péril encouru par le poète serait de perdre le (bon) sens et de s’égarer dans l’insensé. De se trouver, par exemple, comme Rimbaud, le passant d’un Enfer, la victime d’une folie…  Car le parcours du poète est bien différent de celui du philosophe. Quand celui-ci se fixe pour objet de retracer les limites qui bornent la condition humaine, il s’attache d’abord méthodiquement à faire tomber les illusions. Quand il demande « Que peut un homme ? », c’est en se détournant avec fermeté de l’impossible. La poésie reste au contraire au contact de l’illusion, elle s’écrit à partir de ce qui perturbe, inspire, mobilise et met en crise le sujet : le sentiment, la passion, la sensation… La raison n’est pas son maître.

La poésie cherche à savoir à travers une inflammation. Elle tend vers la clarté, mais reste solidaire des ténèbres. Son objet n’est pas de fixer des conduites, ni de prescrire des bornes, mais plutôt de savoir à travers quelles sortes de vacillements nous nous tenons debout.

Il me semble en définitive que l’enjeu de la chercherie ne soit ni plus ni moins que la raison d’être. En sa visée ultime, et quel que soit son prétexte, son point de départ plus ou moins circonstanciel, la poésie ne vise rien moins qu’à réévaluer sur le vif (dans le vif d’une expérience) nos raisons d’être. En tenant le réel et l’idéal vis-à-vis l’un de l’autre, en confrontant sur l’axe du temps ce qui est, ce qui a été, ce qui pourrait être, en faisant donc la somme du possible et de l’impossible, la poésie fait valoir et évalue nos raisons de vivre. Elle évolue du côté de la valeur. Ou elle tend vers la valeur.

Faire en sorte que cette vie soit un peu moins absurde, voilà ce que l’on pourrait demander au poète. Ne l’embellissez pas artificiellement, ne nous trompez pas sur la vérité des choses, mais montrez-nous plutôt de quelle pâte nous sommes faits et combien il entre de rêve et de désir dans la composition de nos jours. Expliquez-nous d’un mot, dans le regard de la passante, les conditions de l’espérance et de l’amour. Dites-nous ce qu’est le temps de vivre et de mourir. Empêchez-nous donc de nous perdre et de nous jeter dans ce qui nous dévore. On ne doit attendre rien moins du poète que la vérité toute nue et tout entière, non pas abstraite et générale, mais concrète et radicale, et telle surtout que s’y trouvent ainsi réévaluées nos raisons de vivre.

Au poète d’établir l’espace où puissent entrer la plainte et la louange : tenir le langage de la valeur et du sentiment.

Au poète d’instaurer la résistance du mètre au chiffre, de la mesure à la spéculation et du rythme de la parole humaine aux bruits de la technique et du négoce.

Au poète de faire montre d’une certaine tenue (autre forme de résistance) dans ce qui existe aussi bien que de ce qui existe : cohésion et cohérence, en définitive, de l’être et du milieu en son parler soutenu.

Au poète de montrer les liens, puisque l’homme à travers l’histoire n’a fait qu’accroître la distance et la séparation.

Ce motif constituera le dernier temps de mon développement…


3.Couper / lier

 

Depuis le milieu du XIXème siècle, la part de la coupure n’a cessé de s’accentuer dans la poésie. Ecrit au couteau,[6] ce titre de Christian Prigent est à maints égards emblématique du geste poétique moderne où la conscience critique et la séparation ont pris le pas sur la parole inspirée et chantante. Coupure, plutôt que couture, tel serait le sort moderne :

Le fragment, il faut le faire. Casser, fracturer, fragiliser, tracer l’arête : affaire de décision tranchante de coupures : écrire. [7]

 Présente cependant dès la fable originaire de la poésie occidentale, avec la tête coupée d’Orphée, la coupure est en vérité inhérente à tout travail d’écriture poétique. Elle en conduit le rythme syncopé. Les poèmes sont des objets de langue nettement découpés : des objets dont on pourrait dire qu’ils font image sur la page car c’est à l’œil qu’ils se donnent pour commencer. A la différence du romancier, le poète travaille par « arrêts fréquents » : il lui faut renouer sans cesse avec des commencements de langue, établir un nouveau rapport à l’originaire. 

La poésie est une langue mise en coupe, et qui brise la prose usuelle par l’interruption, la segmentation des vers qui sont comme autant de segments ou de phrases plus ou moins rompues, emportées dans une « tourne ». C’est par l’hétérogénéité, la juxtaposition, l’anacoluthe et toutes sortes de court-circuits que la poésie prend les armes contre la rhétorique et parvient à électriser le langage. Au ciseau des figures, elle évide ou fait saillir des creux, des bosses, des lignes de force.

Faite d’élans, de surprises et d’intensités, l’expérience poétique impose elle-même à l’existence une espèce de violente scansion, ponctuée d’emportements et de chutes. Elle cadre des instants, focalise l’attention sur des objets de rencontre et prend « l’exister » sur le fait. Ses épiphanies ressemblent à des flagrants délits. Elle espace et fracture la répétitive unité de la vie commune. Ainsi dessine-t-elle ce que Christian Prigent appelle « un lieu d’indécision, un espace d’indétermination du sens, pour témoigner de ce lieu (et affirmer que ce lieu est le lieu spécifiquement humain) »[8]

La parole poétique tient à la connaissance (sourde, confuse, obscure…) que l’homme a de ses brisures. Aussi conduit-elle souvent le langage jusqu’à son point de rupture. Elle vient heurter le silence, ou se découpe en lui. Tout près de se taire à son tour. Menacée de rendre dans le délire son dernier « couac » : « je ne sais plus parler » s’exclame Arthur Rimbaud.

Peut-être les plus touchants poèmes sont-ils ceux où l’on entend une voix tout près de se briser. Une langue qui se brise ou qui est faite de bris : « Mon verre s’est brisé dans un éclat de rire »,  écrit Apollinaire.

Pourtant, si segmentée soit-elle, la parole poétique demeure un travail de filage. En vérité, le poète rivalise avec les trois Parques de la mythologie antique : il file la destinée dans la langue, il la mesure et il la coupe. À moins qu’à l’exemple de Pénélope il ne cesse de tisser puis de détisser sa toile…

La création poétique a pour fondement la capacité à discerner, établir, multiplier et révéler des rapports. De ces rapports viennent les images. Pierre Reverdy définit ainsi l’aptitude du poète :

Sa faculté majeure est de discerner, dans les choses, des rapports justes mais non évidents qui, dans un rapprochement violent, seront susceptibles de produire, par un accord imprévu, une émotion que le spectacle des choses elles-mêmes serait incapable de nous donner.[9]

Il s’agit donc de produire une émotion seconde, de nature esthétique, issue du rapport lui-même, et dont la force tient aussi bien au renouvellement de la vision qu’à son extension inattendue : voici qu’en ce nouveau phrasé, le réel se montre à la fois plus large et plus serré, plus étendu et plus cohérent. C’est là une manière de réplique à l’usure du temps quotidien : à la monotonie de la répétition, la servitude de la fatalité.

Plus étroitement que tout autre objet littéraire, le poème trame ses motifs au gré de la navette du son et du sens, en métaphores filées, assonances, allitérations, au gré des interruptions et des répétitions qui emportent la tourne des vers. Ce faisant, il tisse sur la page une espèce de toile sombre, semblable à celle de l’araignée, et dont les trous et les blancs valent autant que les lignes. En cette toile faite de vers étrangement soudés les uns aux autres, se laissent prendre, comme dans le piège tissé par l’insecte, quantité de passants imprévus : la toile du poème est pour les choses du monde un danger, autant qu’une espèce de dernière demeure…

Pour définir son travail, le poète Jacques Dupin a recours dans Échancré à la métaphore du ver à soie.  L’écriture est "une oeuvre de manducation et de métamorphose insatiable, qui n'opère, qui ne s'accomplit que dans la solitude, l'obscurité, le silence (...)." Il reconnaît dans le ver à soie cette manière qu'ont aussi les mots de ronger le monde "pour accoucher d'une impondérable et tourbillonnante bouchée de fil", cette boulimie désinvolte qui conduit  à manger la feuille pour dévider le fil, à avaler des monceaux de papier pour juste "l'acuité d'un trait de soie". Écrire consiste à tirer de soi  un "embrouillamini de traces", un "nuage de filaments" qui défie la raison et que l'écrivain a pour tâche de suivre, sans céder à "l'obsession de la prise", en acceptant de demeurer dans l'indécidable.  Certes, l'écrivain répète sur la page le geste ancien de la Parque, mais il dévide cette fois un fil aléatoire qui sort de lui et dont il ne connaît que trop l'extrême fragilité. Voué à la dépossession, à la disparition et à l'effacement, il règne le temps de quelques pages sur un dérisoire empire de déchets : comme le ver collé à sa feuille, il fabrique un diaphane début de beauté. Et s'il écrit parfois en vers, c'est que sa vie même ne tient qu'à ce fil. Sa figure propre n'existe pas: il la nie, la piétine et la consume; elle se diffracte, s'échancre et se perd...  Tel est bien le sort moderne du "sujet" dont Roland Barthes écrivait déjà dans Le Plaisir du texte  qu'il se défait dans l'écriture "telle une araignée qui se dissoudrait elle-même dans les sécrétions constitutives de sa toile".

Tout autant que le dehors, ses circonstances, ses objets et ses passants, c’est donc le plus intime et le plus obscur du sujet lui-même qui dans cette toile se trouve pris. En filant et en découpant la langue, le poète constitue un rythme auquel se reconnaîtra sa voix : il constitue comme la secrète signature de son identité.

De curieux enjeux psychiques travaillent l’écriture poétique, ouverte au régressif aussi bien qu’à l’en avant, à même tout à la fois de rétablir du fusionnel à travers son système de répétitions que d’accentuer l’expression des coupures.

Dans son « Apologie du poète », Pierre Jean Jouve la définit comme un état d’agglutination :

 « La Poésie est une pensée — un état psychique — d’agglutination ; c’est-à-dire que des tendances, des images, des échos de souvenir vague, des nostalgies, des espérances, y apparaissent en même temps et comme collés ensemble, provenant de hauteurs tout à fait différentes. »[10]

Le poétique conjugue le distinct et l’indistinct, la détermination (l’accentuation, le soulignement, la bordure) et l’hésitation prolongée. Il semble que ce soit du sein d’une plongée dans l’indistinct que le poète travaille à rétablir ou établir de la distinction. Il ressaisit de l’ipse dans de l’idem, du singulier dans de l’identique. Mais il est, plus que tout autre celui qui entre et se déplace tout d’abord dans l’indistinct, voire celui qui affronte le plus directement la confusion intime : nulle clarté ne s’ouvre pour lui  qui ne suppose d’avoir cédé d’abord à l’illusion.

 

Ecrire poétiquement consiste donc à coudre de fil noir la page blanche, aussi bien qu’à en découdre avec le sens, le non-sens, le réel, la chimère… Et c’est encore s’efforcer de recoudre nos déchirures, nos séparations, nos blessures. C’est incessamment reprendre ­ et repriser une couture qui se défait. C’est répéter ainsi indéfiniment le geste qui fut celui de notre naissance. C’est aussi bien se remettre au monde que faire perdurer le lien avec la langue maternelle. S’efforcer de rentrer, de retourner en elle. Parfois se retourner contre elle : aller donc et venir, à mi-chemin de la naissance et de la disparition, dans l’entre-deux qui est le nôtre.

Écrire, c’est avancer sur un fil, un filet de voix, dans la double ignorance de l’origine et de la fin. C’est dire et questionner la vie entre les deux inconnus qui la bordent. C’est nommer avec précision le présent, tel qu’il ignore ce qui le précède et ce qui le suit.

On sait la prédilection des poètes pour les lieux et les moments lisières : ce qui tout à la fois sépare et relie. Ce qui borde, délimite, mais peut aussi bien s’ouvrir, à la façon d’une plage, sur l’illimité. La poésie est une bordure de langue, qui fait face au débordement. Elle dit notre vie bordée de noir par la mort. La vie dans la lumière noire de la mort, « goutte sombre » au fond de l’encrier. Telle qu’elle nous est infiniment précieuse, puisqu’elle doit nous être retirée. Fenêtre de jour entre deux nuits. « Entre la terre et moi je rencontre la mort », écrivait André Chénier.

 

Si je devais parvenir un jour à quelque définition du poète ou de la poésie, celle-ci aurait l’allure d’une mosaïque : elle serait faite de morceaux ajointés, de couleurs et de formes différentes, mais solidaires les uns des autres par quelques côtés. Et s’il me fallait rassembler autour d’un motif central les propositions fragmentaires qui la constituent ce ne pourrait être sans doute qu’une question qui serait celle de notre destinée.

Volontiers, je définirais le poète comme celui qui reste en éveil dans le temps, plus attentif que tout autre à ce qui passe et change, et désireux de retrouver ce qui demeure à travers le passage même du temps qui n’est jamais pour lui un milieu impur, mais un espace sensible où toute forme de vie se montre à la fois précieuse et menacée. En mobilisant toutes les ressources de la langue, le poète donne de la présence à ce qui s’absente inexorablement : ce qui n’existe pas, ou que le temps emporte, ce qui n’est déjà plus, ou ne sera jamais.

Si la tristesse prévaut dans les poèmes, si la pure expression de la joie y est si rare, c’est que la poésie saisit toute chose dans la fuite même du temps. Elle n’a pas affaire à des idées ni à des concepts. La présence n’est pour elle si vive que de se perdre. Un poème est un pont jeté en travers du temps : tous les reflets qu’on y peut voir par en dessous sont ceux de son écoulement. Poète : celui que rien ni personne ne peut consoler de mourir et que la connaissance de la disparition conduit à s’emparer fiévreusement du langage pour y fixer ce qui s’efface, aussi bien que pour y filer à tombeau ouvert sur les routes mêmes du temps.

© Jean-Michel Maulpoix

 



[1] Humain, trop humain, éd. Denoël Gonthier, p. 150.

[2] Pascal Quignard, Sur le jadis, éd. Grasset, 2002.

[3] Id., p. 107.

[4] Abîmes, p. 44.

[5]  “L’homme habite en poète”, Essais et conférences, coll. Tel, p. 235.

[6] Publié aux éditions P.O.L en 1993.

[7]  Michel Deguy, L’Impair, Farrago éd., 2000, p.57.

[8] Christian Prigent, À quoi bon encore des poètes ?, éd.P.O.L, 1996, p.39.

[9]  Cette émotion appelée poésie, op. cit., p. 57.

[10]  Apologie du poète, Ed. Le temps qu’il fait, p. 9.